La Créature

Laurianne Kapriell

Ceci est un podcast.

Depuis quelques années déjà, je capture en photo des instants de mon réel et les partage sur les réseaux sociaux. Le procédé est toujours le même. Je suis minutieuse. Les écouteurs vissés dans les oreilles, je regarde le monde et je me laisse surprendre. Je découpe des petits carrés de la vie pour les inscrire dans ma galerie personnelle et la ranger aux yeux de tous dans l'alcôve des internets. Et autour, j’installe un récit. Une légende. Inventée, ou peut-être pas.

Il m'arrive parfois d'interroger ce que j’appelle : la Créature. C’est vous, c’est moi, c’est l’inattendue rencontre, c’est l’évocation de vive voix de sensations et d’associations d’idées. C’est une balade mentale où j’explore des terres de l'amour et du vivant. Je sale ma coquetterie de l'incongru. Je découvre que, souvent, l'absurde se marie à la poésie.

J'ai décidé de partager ce que je vois de vive voix. La Créature, ce sont les histoires que je vous raconte, que l’on se raconte à notre époque, jonglant entre les réels dans la réalité. La Créature s’est-elle échappée ?

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Ceci est un rouge à lèvres
Oct 7 2022
Ceci est un rouge à lèvres
Née sur le brasier encore vivace de toute évidence du conflit de genre, la femme cherche à se démarquer aujourd’hui des diktats ancrés. Dans les récits chamaniques, la femme est porteuse du monde et canal des étoiles. Ruisselles sur sa peau des constellations qui ornent autant sa cuirasse que son esprit. Affranchie, instinctive, libre, indocile, insoumise, son parfum est l’élixir de la vie qu’elle porte là où elle souhaite être embrassée. La femme, une autre créature, la fleur aux mille et un malentendus.  A Cette question « qui suis-je ? » « quelle femme je veux être ? ». Moi qui n’a eu aucun modèle. Et faut-il nécessairement en avoir un ? J’ai pourtant cherché des réponses dans les récits, dans mon entourage, à l’écoute des femmes, des féministes et de celles qui se taisent. A l’écoute de cette voix féminine. Ce ton. Désinvolte. Mi chantée. Mi parlée… Des femmes fortes, courageuses.  La femme souhaite prendre de l’amplitude. S’incarner comme iconoclaste ou énigmatique, ou insolante et profondément libre vers un état d’être d’un style imparfait. L’élégance féminine, qui emprunte au vestiaire masculin la puissance d’ancrage se drape de désinvolture qui n’est ni cynique, ni condescendant. Elle est juste lucide. L’absurdité et la volonté de la soumettre à un rôle tissent une poésie noire et contagieuse à laquelle la voix des femmes apporte une dimension aussi charismatique qu’inconvenante. Et c’est en cela que je découvre un mouvement profondément engagé mais qui m’interroge tout autant.
Ceci est le désir funambule
Dec 7 2022
Ceci est le désir funambule
3h23. Une insomnie encore. A l'horizontal je m'interroge sur le désir vital.    En plein déménagement, les cycles de vie se succèdent et ne se ressemblent jamais. C'est dans cet interstice que les étapes de vie se tatouent sur l'âme. Ce déménagement que j'ai tant espéré depuis des années, s'est vécu comme une simple formalité. C'est alors que je m'interroge sur le flux. Ce qui nous pousse à agir. Qu'est-ce qui fait qu'on passe d'une étape de vie à une nouvelle. Ce moment où la créature est nue. Dénudée du passé. Pas encore tout à fait habillée du futur. Tout juste une petite culotte du présent. Alors je me suis interrogée sur ces etapes de vie. L'élan du désir funambule sur le fil fragile de la vie.  Ce passage sur le fil qui se déguise en une perte de repère laisse émerger un autre soi du désir et du désir lui-même. Plus rien n’est comme avant. Une créature fait sa mue du désir funambule sur le fil de soi où la modération n’a pas sa place. Au fil de l’eau, sans avoir un fil à la patte, un récit de vie cousu de fil blanc ou trop facile s’écrit de fil en aiguille. La créature, accrochée, dans le labyrinthe de la vie, au fil d’Arianne, dénudé de fil électrique, connecté aux réseaux du bon sens, allant droit fil au but pour ne plus lui donner du fil à retordre. La transition est fine comme un fil de fer à couper le beurre. Du beurre, l’argent de la crémière et son cul, oui, elle veut tout sur le fil du désir. C’est alors qu’une autre créature voit le jour.